Juin 1940 : la résistance avant la Résistance
- La FRANCE en juin 1940
En ce mois de juin, la situation s'aggrave de jour en jour: exode massif des populations qui affluent du Nord de la France, bombardement de l'aviation allemande, déroute de l'armée Française et repli précipité des Anglais.
Le14 juin, Paris est pris. Le17 juin, Pétain demande aux Français d'arrêter le combat. A Granville, le rapatriement par mer des soldats anglais a déjà commencé et ce avant l'appel du 18 juin. Cet acte orchestré par Maurice MARLAND constitue une des premières manifestations de résistance.
- Maurice MARLAND et le choix du refus
Tout comme en 38 lors de l'accueil des Républicains Espagnols et en 39 lors de l'hébergement des premiers réfugiés venus du Nord de la France et de la Belgique, Maurice MAR LAND se trouve en première ligne pour organiser le départ des soldats anglais repliés à Granville.
Cette attitude apparaît comme évidente pour cet homme engagé depuis toujours dans les actions de solidarité. Face au désastre qui accable la majorité de ses compatriotes il choisit de relever la tête, de continuer la lutte. Le professeur d'anglais qu'il est, a noué depuis longtemps des liens amicaux avec la Grande-Bretagne. S'appuyant sur des hommes de confiance, notamment des marins granvillais, il organise les évasions vers Jersey. Au total c'est une centaine de personnes, estime-t-on, (Britanniques et Français) qui réussissent à rallier l'Angleterre, via Jersey, grâce notamment au dévouement de Jules Leprince.
Celui-ci effectuera sur sa vedette "la Mouette" plusieurs navettes entre Granville et les îles Anglo-normandes.
Jules Leprince | la mouette |
Parmi les Anglais évacués, le capitaine Gertrude Margry témoigne :
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Capitaine Margry, le 14 février 1949 : "Le 10 juin 1940, j'ai quitté l'ambassade de Grande-Bretagne, et je suis partie avec la compagnie du canal de Suez pour Granville, où ils avaient installé une "antenne". Je devais agir en tant que "agent de liaison" entre la compagnie et le "Foreign Office" (bureau des Affaires étrangères). Nous sommes arrivés à Granville le 11 juin 1940 et le 18, les Allemands ont occupé la ville. Le professeur M. Marland a montré un grand courage dès l'arrivée des Allemands dans la ville. 52 soldats britanniques y étaient arrivés à pied après la bataille de St Valéry, s'étant procuré des vêtements ici et là chez des agriculteurs français. M. Marland a sympathisé avec eux, les a cachés en ville et a essayé de convaincre des pêcheurs de les emmener aux Îles Chausey, sur la route de Jersey. Au début, ils ont refusé car les Allemands occupaient des baraquements au dessus du port mais ils ont fini par accepter le risque de prendre la mer, de nuit. Lorsque je suis allée le voir, le lundi 24 juin, M. Marland avait fait rapatrier 50 d'entre eux et projetait de faire partir les deux qui restaient avec plusieurs Français, dont des soldats de la Marine, qui voulaient rejoindre de GAULLE. Nous nous sommes tous cachés dans la maison des pêcheurs et nous sommes partis après minuit pour les Îles Chausey. Nous sommes arrivés à Jersey le mercredi 26 juin, dans la soirée, et à Southampton le 27. M. Marland m'a donné des informations quant aux mouvements des troupes allemandes, aérodromes etc..., et m'a demandé de les communiquer rapidement aux autorités. En arrivant à Jersey, j'ai pu téléphoner au "Treasury" et parler à M. Waley qui a lui même transmis les informations au ministre de l'Armée de l'Air. M. Marland m'a également demandé de faire savoir ce qu'il faisait à M. Philip Nichols, du Foreign Office, et d'ajouter qu'il ne craignait pas d'être tué par les Allemands, s'il pouvait servir la cause. "
Pourtant trois soldats ne purent s'enfuir. La présence de soldats anglais, qu'il fallait cacher, fut une lourde charge pour le groupe, excitant la surveillance de l'occupant. Leur planque est d'abord improvisée, comme le montre ce témoignage: "trois soldats britanniques (Écossais), qui n'avaient pu passer assez vite en Angleterre, via Jersey, erraient et se cachaient dans la nature. L'un d'entre eux, Robert Graig, se présente le 7 juillet 1940 chez une commerçante en fourrures de la rue Couraye et tente de s'expliquer. Elle comprit vite la situation.." Grâce à elle, le soldat et deux camarades sont cachés chez un Granvillais ayant travaillé en Angleterre, puis chez une dame de nationalité britannique. Celle-ci est internée en décembre; il faut trouver une autre cache. Un des Anglais, démoralisé, se rend. Les deux autres sont pris en charge, fin 1940, par le groupe Marland. Après avoir circulé de planque en planque, l'un d'eux est acheminé en zone non-occupée (septembre 1942) et remis au consul des États Unis. L'autre retourne finalement chez la commerçante de la rue Couraye où il échappe en Janvier 43 à une descente allemande. A nouveau en juin 43 il s'en faut de peu qu'il ne soit pris dans sa nouvelle cache au bout du port.. M. MARLAND le dissimule alors dans une maison amie du quartier St Paul. Ce n'est qu'en 1944 qu'il pourra être évacué en Suisse, via Paris, grâce au réseau "Centurie". L'obligation dans laquelle fut le groupe de cacher si longtemps ces soldats, sans pouvoir les évacuer, s'explique. Un marin du groupe l'analyse ainsi: "il semble que "Bob" n'étant ni un officier supérieur, ni même d'une spécialité longue ou difficile à former, sa récupération ne valait pas le risque d'une vedette rapide". Il faut souligner que ces soldats n'ont pu échapper à l'arrestation que grâce à des complicités accordées sans rechigner. Ainsi un jeune médecin de la rue Michelet accepte "aussitôt, sans hésiter" de soigner "Bob" malade. Au côté des soldats anglais, 30 à 40 jeunes purent rallier les Forces Française libres. Parmi eux deux jeunes Granvillais âgés respectivement de 18 et 19 ans. Tout naturellement c'est vers le professeur de l'EPS qu'ils se tournent. Ils témoignent :
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